Tchad: Les Frères Hissein Bourma proches de Hinda Deby ITNO au cœur d’une importante enquête par un organisme canadien sur les fonds planqués au Canada.
Tchad: Les Frères Hissein Bourma proches de Hinda Deby ITNO au cœur d’une importante enquête par un organisme canadien sur les fonds planqués au Canada.
Les Frères Hissein Bourma proches de Hinda Deby ITNO au cœur d’une importante enquête par un organisme canadien sur les fonds planqués au Canada.
Enquête et révélations sur les détournements massifs des revenus pétroliers et leur blanchiment dans des opérations immobilières à Montréal.
Lisez ce rapport détaillé en intégralité , qui servira à retracer les revenus pétroliers détournés . Nous reviendrons pour commenter en détail ce rapport explosif mis à votre connaissance par ZoomTchad.
De 2012 à 2016, la belle-famille du dictateur tchadien Idriss Déby a investi avec des proches près de 8,6 M$ dans l’immobilier montréalais, à L’Île-des-Sœurs et dans Griffintown, presque toujours sans prendre de financement hypothécaire, a constaté notre Bureau d’enquête.
Durant la même période, ils contrôlaient plusieurs leviers financiers du Tchad en multipliant les controverses : valise de billets de banque aux frontières, allégations de détournement de fonds par les services secrets, conflits d’intérêts dans les marchés publics, commissions obscures dans les contrats pétroliers…
En 2014, le couple présidentiel américain a accueilli le dictateur tchadien Idriss Déby Itno et sa femme, Hinda Déby Itno, dont l’entourage contrôle la rente pétrolière du pays.
Parmi eux, Ibrahim Hissein Bourma a occupé la direction des ventes de la Société des hydrocarbures du Tchad (SHT), une compagnie «publique» à la gestion obscure, qui vend du pétrole pour le compte de l’État. De son côté, son beau-frère Mahamat Kasser Younous a carrément dirigé l’entreprise publique jusqu’en 2014.
En fait, la SHT est depuis plusieurs années sous la coupe de la femme du président, explique un chercheur de l’organisation d’aide au développement Swissaid, qui doit publier ce mois-ci un rapport sur la gestion des revenus pétroliers au Tchad. «Tout ce qui concerne la Société est assez opaque, dit Lorenz Kummer. Le problème, c’est que la première dame et ses proches ont toujours des relations avec la direction. Ils n’ont aucun intérêt à être transparents.»
Ibrahim Hissein Bourma
Le beau-frère du dictateur investit 6 M$ à Montréal
Marié à la sœur de l’épouse du dictateur tchadien Idriss Déby, Ibrahim Hissein Bourma, 28 ans, est déjà rompu à la manipulation de grosses sommes d’argent. En 2013, ce riche entrepreneur s’est même fait pincer à l’aéroport du Caire avec 199 000 euros en liquide dans sa valise, alors qu’il voyageait avec un passeport diplomatique vers Dubaï.
À l’époque, le jeune homme d’affaires venait de commencer ses multiples transactions dans le marché montréalais : des investissements de plus de 5,9 M$ en condos en cinq ans. En une seule journée en juin 2016, il a dépensé près de 3,16 M$ pour acheter 10 appartements de la tour «Exalto» de Devimco, rue Peel, dans le quartier Griffintown. Le tout, sans jamais prendre d’hypothèque, et malgré ses problèmes d’argent liquide à la frontière.
Place des Jardins-des-Vosges à L’Île-des-Sœurs. Ibrahim Hissein Bourma y a acheté son premier condo à Montréal.
Contacté dès août 2016, Hissein Bourma a expliqué à notre Bureau d’enquête qu’il est attiré par la solidité du marché immobilier au Québec. «À Dubaï, vous pouvez acheter des appartements à un prix et ça chute super rapidement, dit-il. À Montréal, c’est resté stable depuis des années…»
Il songe à faire une demande d’immigrant investisseur. «J’ai deux enfants, je crois qu’ils vont s’installer à Montréal. C’est une ville qui a de l’avenir, très calme, sécurisée, dit-il. Je suis attiré par l’éducation du Canada.»
Questionné sur son interception au Caire en 2013 avec sa valise de billets de banque, il a assuré que cet événement n’a «jamais eu lieu». «Je n’ai jamais été arrêté, nulle part.»
Son avocate d’immigration, Sabine Venturelli, a d’abord certifié que le procès-verbal de l’incident égyptien, en notre possession, était un faux document.
Mais notre Bureau d’enquête a continué ses recherches, et deux mois plus tard, nous avons retracé le dernier jugement sur l’affaire, directement au greffe égyptien. Le document confirme que les billets se trouvaient dans un double-fond de la valise de Hissein Bourma.
«(…) l’officier a constaté l’existence d’une bosse au fond de la valise : un double-fond où étaient logés deux sacs noirs en tissu, mentionne le jugement de novembre 2015. En les ouvrant, il a trouvé 199 000 €.»
Après l’avoir condamné en première instance, la Cour économique du Caire a toutefois acquitté Hissein Bourma pour une raison technique : la compagnie aérienne ne lui aurait pas présenté le formulaire où il aurait pu déclarer ces fonds.
Lorsque notre Bureau d’enquête a recontacté Me Venturelli pour obtenir la réaction de son client à ces informations, elle est restée plus d’un mois «sans instructions précises» de Hissein Bourma.
Fin mars, elle a finalement envoyé un courriel où elle insiste sur son acquittement, qui «blanchit» son client «de toute accusation et révoque tout jugement antérieur». «Pour notre client, cet incident était clos et c’est pour cette raison qu’il vous a répondu comme il l’a fait», dit-elle.
Bloqué par le Homeland Security
Washington aussi s’interroge sur les fonds d’Hissein Bourma.
Toujours en mai 2013, alors qu’il trimballait du liquide en avion, l’homme d’affaires a aussi déposé près de 540 000 $ US dans un compte d’immigrant investisseur aux États-Unis, pour l’injecter dans un projet d’hôtel Hyatt en Floride et s’installer au pays. Mais quatre ans plus tard, Bourma vient d’abandonner l’idée. Le Homeland Security Department a refusé sa demande, invoquant ses déclarations changeantes et imprécises sur la façon dont il a fait parvenir ces fonds aux États-Unis.
Chose certaine, l’avocat de Hissein Bourma a déclaré dans les documents américains que l’argent provenait de son conglomérat installé à Dubaï, Oum Alkheir, qui multiplie les contrats avec le gouvernement de son beau-frère dictateur, Idriss Déby.
À son interception en Égypte, Hissein Bourma a d’ailleurs déclaré que ses 199 000 € devaient servir à acheter des matériaux pour cette entreprise, qui venait de décrocher le contrat de construction du ministère des Affaires étrangères dans la capitale tchadienne, N’Djaména.
Les mains dans le pétrole
Pendant qu’il diversifie ses investissements à Montréal, l’homme à tout faire est aussi très occupé dans son pays d’origine. En plus de multiplier les contrats avec l’État, il a piloté, à partir de 2011, la division marketing de la Société des hydrocarbures du Tchad (SHT). Cette compagnie publique a vendu pour 682 M$ US de pétrole en 2014.
Hissein Bourma assure aujourd’hui qu’il n’a jamais travaillé pour la Société, dont le Fonds monétaire international et différentes organisations non gouvernementales dénoncent l’opacité dans la gestion des revenus, année après année.
«Je n’ai pas eu de position de directeur à la SHT, assure-t-il. Il y a des choses sur Internet qui n’ont rien à voir avec la réalité.»
Mais les informateurs de notre Bureau d’enquête sont formels, tout comme les médias spécialisés dans l’économie africaine. Hissein Bourma a bien dirigé le département de commercialisation de la Société, vraisemblablement jusqu’en juillet 2016, selon nos sources sur le terrain, qui doivent rester anonymes pour protéger leur sécurité.
Pourquoi une telle discrétion sur ses fonctions passées à la SHT? La réponse ne viendra ni de Hissein Bourma, ni de ses avocats montréalais. Mais selon Transparency International, un organisme qui débusque la corruption dans le monde, les revenus pétroliers au Tchad sont «largement considérés comme ayant contribué à alimenter les guerres et les rébellions, à entretenir les réseaux de patronage, à augmenter la corruption et le copinage et à détériorer le système de gouvernance du pays».
Le jeune beau-frère du dictateur Déby a plusieurs cordes à son arc, mais certaines d’entre elles sont peut-être plus difficiles à assumer.
Un avocat «partenaire» d’Hélène Mathieu
Le beau-fils du dictateur tchadien Idriss Déby a choisi le cabinet Roussin Lessard comme domicile élu de sa compagnie, quand elle a commencé à investir ses millions à Montréal. Sur son site, le bureau affiche ses relations privilégiées avec un cabinet rendu célèbre par les Panama Papers : celui de la Québécoise Hélène Mathieu, installée à Dubaï.
Le cabinet Roussin Lessard est le domicile élu de la compagnie d’Ibrahim Hissein Bourma, beau-frère du dictateur tchadien Idriss Déby. Le bureau d’avocats vante sur son site Internet son partenariat avec celui d’Hélène Mathieu à Dubaï, qui figure dans les Panama Papers.
Cette avocate originaire de Joliette a enregistré pas moins de 900 entreprises dans les paradis fiscaux en une quinzaine d’années, en partenariat avec le cabinet Mossack Fonseca, rapportait Radio-Canada l’an dernier.
Hélène Mathieu
Trois de ces entreprises ont subi des sanctions économiques internationales, notamment pour avoir servi à livrer à la Syrie des produits pétroliers pouvant avoir un usage militaire.
Comme Mathieu, le client tchadien de Roussin Lessard, Ibrahim Hissein Bourma, habite Dubaï, où il a établi le siège social de son conglomérat. C’est également vers cette ville que le jeune millionnaire se dirigeait quand les autorités égyptiennes l’ont intercepté à l’aéroport du Caire, avec 199 000 € (293 000 $) dans le double-fond d’une valise.
Olivier Lessard, avocat montréalais d’Ibrahim Hissein Bourma, le beau-frère du dictateur tchadien Idriss Déby
Olivier Lessard, l’associé en charge de l’entreprise de Hissein Bourma, n’a pas voulu élaborer sur sa pratique ou ses liens avec le cabinet d’Hélène Mathieu.
Mahamat Zene Bourma (frère d’Ibrahim Hissein Bourma, marié à la fille du dictateur Idriss Déby)
Le beau-fils d’Idriss Déby et son pied-à-terre à Montréal
Comme son frère Ibrahim Hissein Bourma, Mahamat Zene Bourma est bien marié : il a épousé la fille du dictateur Idriss Déby. Jusqu’à récemment, il arrivait lui aussi à multiplier les contrats publics lucratifs, tout en administrant les deniers de l’État. Mais en octobre dernier, les choses ont mal tourné : les services secrets du pays l’ont fait arrêter pour détournements de fonds massifs.
Jusque là, tout allait plutôt bien pour Mahamat Zene Bourma et son entreprise, Zen Corporation, qui a vendu des flottes entières de véhicules au gouvernement de son beau-père. En 2013, il a pu lui aussi acquérir son condo à L’Île-des-Sœurs, dans la tour Evolo 1 de Proment, pour près d’un demi-million de dollars – sans hypothèque.
L’homme d’affaires de 37 ans, grand importateur de farine dans son pays menacé de famine, a ses entrées dans la jet-set d’Afrique, d’Europe et de Dubaï et se dit «amoureux de Montréal» depuis 2007. En 2010, Zene Bourma a même fait partie d’une délégation d’hommes d’affaires africains ayant rencontré le président Barack Obama à Washington.
Mieux : en plus de multiplier les contrats publics, Zene Bourma occupait à l’époque un poste névralgique au sein de l’État, celui de Trésorier payeur général. Au Tchad, ce haut fonctionnaire contrôle la caisse du gouvernement et autorise les paiements du ministère des Finances.
Les services secrets à dos
Mais l’automne dernier, Zene Bourma a eu de gros problèmes. «Il y a eu un souci avec l’État et j’ai connu pas mal de problèmes», dit l’homme d’affaires, que notre Bureau d’enquête a contacté en France.
En fait, les services secrets tchadiens l’ont fait arrêter sur des soupçons de détournements de fonds massifs. «C’est un règlement de compte. L’Agence nationale de sécurité a écrit une fiche au chef de l’État», dit-il. Elle l’a accusé d’avoir détourné «plus de 38 M$ US, soit 51 M$.
Zene Bourma assure qu’il s’agit de fausses accusations. «Chez nous, si on décide qu’on vous détruit, on va vous détruire», dit-il. Difficile d’en savoir plus à ce sujet, mais après cet épisode, son dictateur de beau-père a décidé de l’éloigner des cordons de la bourse et de le remplacer comme Trésorier payeur général.
Le Tchad a aussi prié l’homme d’affaires de rembourser 640 M de francs CFA (1,4 M$), soit 8% de ce qu’il avait obtenu dans son dernier contrat avec l’État. Le ministère de la Santé lui avait passé une commande pour une centaine d’ambulances, sans appel d’offres.
Selon nos sources, le gouvernement aurait demandé ce paiement parce qu’il jugeait que Zene Bourma, qui était aussi son propre haut fonctionnaire aux finances, l’avait floué en le surfacturant et en recevant des paiements avant même l’approbation du contrat.
L’homme d’affaires assure plutôt que l’État a obtenu cette «ristourne» lors d’une «négociation commerciale» avec son entreprise, Zen Corporation. Pourquoi avoir plié? «Quand l’État demande, vous acceptez!» dit-il.
Heureusement pour Zene Bourma, il peut toujours venir se changer les idées dans l’appartement coquet que lui a vendu Proment à L’Île-des-Sœurs : sans locataire depuis des mois, il n’attend que lui.
Mahamat Kasser Younous et sa femme Amina Hissein Bourma (soeur d’Ibrahim Hissein et Mahamat Zene Bourma)
L’ex-patron de la pétrolière publique à L’Île-des-Sœurs
Mahamat Kasser Younous, alors qu’il dirigeait la Société des hydrocarbures du Tchad.
Avant d’acheter pour près de 1,2 M$ en propriétés montréalaises avec sa femme, Mahamat Kasser Younous s’est lui aussi vu confier de hautes responsabilités par le dictateur tchadien Idriss Déby : la direction de la Société des hydrocarbures du Tchad. Et comme les frères de son épouse, il a perdu son poste, dans des circonstances obscures.
Sous son règne, cette compagnie publique a commencé à vendre le pétrole de l’État, devenant ainsi sa principale vache à lait. Les ventes de la Société (SHT) totalisaient 288 M$ US en 2012, pour grimper jusqu’à 682 M$ US en 2014, année où le président Déby a remplacé Younous comme directeur général.
Le principal intéressé n’a pas rappelé notre Bureau d’enquête pour expliquer comment il a perdu son poste. Il aurait fait les frais d’une «guerre d’influence», mais surtout, de rapports défavorables concernant le versement de commissions sur certaines transactions, selon les sources de notre Bureau d’enquête au Tchad, qui doivent conserver l’anonymat pour des raisons de sécurité.
Pionnier de la famille à Montréal
Aujourd’hui, Kasser Younous est installé à Besançon, en France. Mais à une époque plus glorieuse, il fut le premier de la famille à s’intéresser au marché montréalais, avec son épouse Amina Hissein Bourma, la sœur d’Ibrahim et Mahamat Zene.
En février 2012, ils ont d’abord mis la main sur un appartement de 345 000 $ au sixième étage d’un immeuble de L’Île-des-Sœurs. Mais Kasser Younous a fait sa grosse acquisition en juillet 2013, en mettant la main sur une grande maison en rangée de la petite rue privée des Parulines, dans le même quartier, pour 830 000 $. Sans aucune hypothèque, comme le veut la tradition familiale.
Aujourd’hui, la luxueuse maison est habitée par un de ses neveux chauffeur de taxi, qui a contacté notre Bureau d’enquête après avoir trouvé une note laissée chez lui.
«Je ne lui paye pas de loyer. Il n’est pas à ça près! dit-il. Sa maison, ça fait quatre ans qu’il l’a et elle est à l’abandon. Pour lui, c’est une façon de placer son argent!»
Jacques Ndjamba Mbeleck
L’ami camerounais à L’Île-des-Sœurs
Décidément, les condos chics de L’Île-des-Sœurs sont populaires auprès des huiles du pétrole tchadien.
Jacques Ndjamba Mbeleck est cofondateur du cabinet d’audit comptable camerounais CAC International et consultant de longue date pour le ministère du Pétrole et la Société des hydrocarbures du Tchad (SHT). Cet homme d’affaires a dépensé plus d’un million de dollars pour ses deux appartements montréalais.
Il a signé l’achat de son premier condo le 21 février 2012, juste au lendemain de la première transaction du directeur de la SHT, Mahamat Kasser Younous. Leurs deux appartements sont à 15 minutes à pied. À l’époque, ils occupaient tous deux des postes stratégiques dans l’industrie tchadienne de l’or noir, l’un comme consultant, l’autre, comme haut dirigeant d’une société d’État.
Quelques mois avant la première transaction à L’Île-des-Sœurs, le cabinet CAC avait reçu un curieux paiement de 7,4 M$ US de Griffiths Energy International. Cette pétrolière canadienne venait de remporter une soumission pour exploiter des gisements au Tchad.
Le hic, c’est que le cabinet de Ndjamba Mbeleck était à contrat depuis plusieurs années avec le gouvernement, précisément pour l’aider à encadrer les compagnies pétrolières.
En 2013, un organisme qui surveille la transparence dans l’exploitation des ressources naturelles a souligné cette apparence de conflit d’intérêts en termes voilés dans un rapport.
«Contrairement aux meilleures pratiques, ce montant a été versé directement par (Griffiths) pour le compte de l’État à une société de conseil camerounaise (CAC)», mentionne le document de l’Initiative pour la transparence dans les industries extractives (ITIE).
Autrement dit, le cabinet de Ndjamba Mbeleck a reçu des millions de Griffiths, alors qu’il aidait le Tchad à écrire ses lois pour maximiser les redevances en provenance des pétrolières… dont Griffiths.
D’ailleurs, la compagnie albertaine, depuis absorbée par Caracal Energy, puis par la Suisse Glencore, n’avait pas lésiné sur les moyens pour assurer le succès de ses négociations avec N’Djaména. Pour obtenir ces fameux gisements, Griffiths a même reconnu avoir versé des pots-de-vin d’une valeur de dizaines de millions de dollars à l’ambassadeur tchadien à Ottawa et Washington, ainsi qu’à son assistant.
Au téléphone avec notre Bureau d’enquête, Ndjamba Mbeleck, qui a depuis quitté le cabinet CAC, assure que le paiement de 7,4 M$ US était tout à fait régulier. Le montant représente une proportion du bonus qu’a donné Griffiths au Tchad quand il a obtenu ses gisements.
«Le contrat a été approuvé par la loi et par le parlement», assure-t-il.
Mais à l’organisme Swissaid, l’enquêteur Lorenz Kummer, qui prépare un rapport sur l’opacité de l’industrie pétrolière au Tchad, n’a jamais réussi à trouver ces contrats, ni ceux que CAC a décrochés dans le cadre de la nationalisation de Doba, un autre grand gisement de pétrole du pays, en 2014. Cette opération de 1,3 milliard de dollars US a tourné à la catastrophe pour le peuple tchadien, avec la baisse du prix de l’or noir.
«Je n’ai jamais vu ces contrats. Publics où? Sur le site du ministère du Pétrole ? Il n’y a absolument rien là», dit-il.
Qu’à cela ne tienne. Ndjamba Mbeleck n’est pas tendre envers l’auditeur qui a signé le rapport critique de l’ITIE, Anton Mélard de Feuardent, un ancien collègue qui serait «jaloux» des contrats que CAC a remportés en Afrique. «Personne n’a pris ce rapport en considération, parce que ce sont des âneries», dit-il.
Selon le Fonds monétaire international, les rapports de l’ITIE produisent «des données concrètes et fiables» sur les recettes pétrolières des pays qu’il audite. Les informations qu’ils contiennent dévoilent généralement «toute recette laissée hors budget, notamment les bonus et autres paiements ponctuels».
Ami de la famille
Chose certaine, Ndjamba Mbeleck a créé des liens avec les huiles de l’État tchadien, notamment Mahamat Zene Bourma, ex-Trésorier payeur général. Quand ce beau-fils du dictateur a acheté son condo de la tour Evolo, le Camerounais lui a permis de donner ses coordonnées montréalaises au notaire.
«Quand il vient, on lui demande une adresse, là-bas à Evolo. Il n’en a pas, et je lui dis de donner la mienne. Je pense que c’est la moindre des choses qu’on peut faire à un ami!» dit l’expert-comptable, dont la compagne et les deux enfants sont Canadiens.
Le gratte-ciel de Proment, achevé en 2012, a aussi séduit Ndjamba Mbeleck, qui a mis la main sur un penthouse du 30e étage, son deuxième condo à l’Île-des-Sœurs.
Le promoteur immobilier n’a pas rappelé notre Bureau d’enquête pour répondre à nos questions sur ces transactions.
Hugo Joncas | Bureau d’enquête, avec la collaboration d’Emmanuel Freudenthal, journaliste indépendant .Publié le 2– Mis à jour