Le DNIS s’est ouvert ce matin. Le CODNI se devait de relever le défi de son organisation et la réussir.
Force a été de constater que les défaillances et insuffisances furent nombreuses. D’abord, la mise en place fut désordonnée presque chaotique ; les politico- militaires sont mélangés avec le Corps diplomatique, les membres du CNT avec ceux du gouvernement etc. Ensuite, un nombre incalculable de personnes a été laissé en rade, faute de badges pour accéder à la salle. Puis, l’organisation de la prise de parole fut aussi décevante. La journée du lundi sera réservée pour essayer de faire des réglages, donc un ajournement du DNIS, on se rend compte qu’il n’y a pas eu de séances de test pour apprécier le fonctionnement de la machine avant le jour J.
En outre, aucun discours n’était traduit en arabe, jusqu’à l’intervention du représentant du Qatar ; on ne peut pardonner cette grosse lacune car il était important que les participants puissent comprendre ce qu’il a déclaré, considérant le rôle capital joué par son pays.
Que dire de la sonorisation, qui était, elle aussi, pas calibrée aux normes. Les défaillances de la sono se verront encore plus dans la partie culturelle du DNIS.
Enfin, les caméras ne balayaient pas toute la salle, de ce fait, les mêmes angles revenaient sans cesse. On peut mieux faire facilement. Le podium principal était surchargé par la présence de personnes dont on se demande le rôle, conséquence à l’écran, ce fut très dérangeant.
En ce qui concerne les discours :
Grosse déception avec des discours pauvres qui ne sont pas à la hauteur de l’enjeu.
Le discours du PCMT était trop simple, sans relief, sans projection importante, sans vision réelle pour l’avenir. On s’interroge sur cette phrase du PCMT : « Je rêve d’un Tchad où la Dia sera prohibée » Très étonnant et on se demande qui a pu glisser cette peau de banane dans le discours.
Rappelons que la Dia est le versement d’une indemnité de décès en cas de mort provoquée par une bagarre. Elle permettait d’éviter des actes de vengeance. Elle existait, dans de nombreuses régions, bien avant la colonisation, la chefferie traditionnelle à travers ses chefs et notables ont toujours joué leurs rôles de médiateurs et de régulateurs sociaux pour la gérer. Certes, il est vrai qu’il y a des abus avec des montants exorbitants. Constatons que le principe de la Dia existe bel et bien dans la justice moderne. Il convient de l’encadrer par un consensus. Affaire à suivre.
Le point à retenir de cette cérémonie d’ouverture :
Moussa Faki Mahamat affiche ses ambitions, martèle des propos très critiques envers le pouvoir de Mahamat Idriss Deby.
Surfant entre ses casquettes de Président de la Commission de l’UA et de fils du Tchad, il a posé les limites d’un Dialogue National où il y a des absents. Il a aligné les exemples pour souligner qu’il doute de ce DNIS. « On a fait la même chose, il y a trente ans et nous voilà à nouveau à la case de départ »
Constatons que ses critiques avec des mots assez durs « sempiternelle crise » « que cette fois-ci, sera définitivement la bonne », « dénonçant un communautarisme, véritable gangrène pour le pays ». Utilisant une interpellation directe « Votre défi ».
On avait bien le sentiment d’une offensive mieux une charge contre le PCMT. Moussa FAKI vient de poser le pied dans la ligne de départ pour une course à l’élection présidentielle. Sans conteste.
Sur la forme, il a égratigné le protocole de prise de parole, en prononçant son discours en français puis en arabe, comme s’il voulait s’assurer d’une audience la plus large possible. A la fin, il a refusé de remettre une copie de son discours au PCMT malgré la demande du protocole d’État, pour les archives. Preuve s’il fallait de son état d’esprit.
Moussa FAKI Mahamat a soldé ses comptes avec la junte tchadienne bien installé dans sa présidence de la commission de l’UA. De manière pernicieuse, il a bien sûr, jeté des fleurs à Idriss Deby, comme pour dire, que ses critiques ne le concernent pas.
La ligne directrice de son discours visait à contrer le PCMT, tout le monde l’aura compris. Pas un seul mot positif pour Mahamat Idriss Deby.
Ce positionnement est intéressant car si son poste de Président de la Commission de l’UA ne lui permet pas de faire de la politique politicienne, il n’en demeure pas moins que la tentation a été très forte, et, M Moussa FAKI a saisi l’opportunité en profitant du rôle de l’UA dans le Pré-Dialogue et dans le processus de transition, pour tacler le PCMT mais aussi pour poser ses billes pour un proche avenir.
Il a ainsi utilisé cette tribune exceptionnelle pour revenir sur la scène politique et prendre date pour un prochain rendez-vous. Ayant été plusieurs fois, ministre, directeur de cabinet de Deby, président du Conseil économique et social, Premier Ministre (2 ans) puis ministre des affaires étrangères (9 ans) et enfin, président de la Commission de l’Union Africaine depuis 5 années, il a, à l’évidence, commencé à dérouler son plan et à étaler ses ambitions.
Son parcours nous révèle clairement qu’il était un homme du clan Deby, un homme du système qui a mis le Tchad à terre. Il faisait aussi partie du groupe qui a réduit à néant les recommandations de la Conférence Nationale Souveraine de 1993, en d’autres termes, il faisait partie des hommes qui ont ramené le pays à la case de départ aujourd’hui. L’amnésie en politique ….
Il fait sienne ainsi la position du clan Deby, dans l’après-Deby, à savoir le PCMT est un intrus à combattre. Il est regrettable qu’une telle posture avec la couverture de ses fonctions au sein de l’UA, tonne dans cette grande salle, où les Tchadiens aspirent à la paix, à se réconcilier. La compétition pour le leadership au sein du clan Deby vient d’être lancée pour la conquête du pouvoir.
La Rédaction de Zoomtchad